LES MAULÉON,

SEIGNEURS DES FIEFS DE SAINT-LOR À SANNOIS

ET DE CERNAY À ERMONT



Cette famille, que Mathieu Lours a cru originaire de Saint-Brice1, est en réalité possessionnée avec la seigneurie de Cernay à Ermont, et celle du fief de Saint-Lor à Sannois, qui n’a pas été authentifiée par Brigitte Bedos dans sa thèse « La Châtellenie de Montmorency des origines à 1368, Aspects féodaux, sociaux et économiques »2. Nous résumons ici le résultat des recherches en archives qu’Edmond Barbier a menées sur cette famille des Mauléon, tel que présenté dans l’un des ouvrages sur Sannois dont il est le co-auteur3.

Au XIIIe siècle, les Mauléon tiennent, à Sannois, le fief de Saint-Lor.

André Vaquier4 et Brigitte Bedos5 ont esquissé la généalogie de cette famille. Un certain nombre de documents permettent de préciser et de rectifier ce qui a été écrit sur ce sujet.

Le premier membre connu de cette famille est un Guillaume de Mauléon. Il apparaît en 1189, comme témoin d’une charte d’Hugues, abbé de Saint-Denis. Il a deux fils, Pierre et Raoul, témoins de l’hommage rendu par Renaud Bateste à l’abbé de Saint-Denis en 1208.

Pierre I est plusieurs fois cité dans les cartulaires de Saint-Denis, en 1206 et en 1208, pour le tiers de la dîme de « Cennoiz » qu’il aurait abusivement achetée à l’abbaye de Saint-Denis. Une autre charte, de novembre 1230, apprend qu’il est homme-lige de l’abbaye et marié avec Hodierne dont il a un fils, Guillaume, qu’il « offre » comme moine à l’abbaye.

Raoul, l’autre fils de Guillaume, est seigneur de Saint-Lor. Il est chevalier et tient son fief des Montmorency. Une soixantaine d’années plus tard, la seigneurie est entre les mains de Robin, fils de Pierre II de Mauléon. Cette transmission familiale engage à voir en Pierre II le fils de Raoul.

Pierre II de Mauléon nous est connu par sa pierre tombale de 2,50 m de long sur 1,15 m de large dont la partie supérieure gauche est brisée6. Elle présente, un peu au-dessus de son centre, un grand écu armorié dont le champ pointillé porte deux fasces unies. L’application des règles de l’héraldique a mené l’abbé Lebeuf à y reconnaître des fasces d’argent7 et André Vaquier un fond d’or8. François de Guilhermy a très bien lu cette épitaphe, ainsi conçue :


« CI. GIST. MON. SEIGNEUR

PIERRE. DE. MALLION. CHEVALIER. QUI. TREPASSA.

LAN. DE. LINCARNA.

TION. DE. NOSTRE. SEIGNEUR. M. CC. LX. XI. LE. JEUDI.

DEVANT LA SAINT JEHAN9. PRIEZ. POUR. LAME. DE. LI. ».


Pierre II est marié à Aveline dame de Cernay, dont le sceau ogival de 33 mm de hauteur appendu à un acte de février 1283, nous est conservé. Il représente en son centre une femme debout, voilée, les deux bras fléchis vers sa droite et tenant de sa main gauche une fleur, appendu à un acte de février 1283, nous est conservé. Une légende l’entoure en lettres gothiques :


« +. AVELINE. .ME. DE. CERNAI » (Aveline dame de Cernay).


On a voulu faire de Pierre II le seigneur de Cernay10. Celui-ci est largement possessionné à Cernay - le fait est attesté -, mais la seigneurie de Cernay appartient à l’époque à Jean de Cernay, écuyer, qui la lègue, en février 1270, avec une grande partie de ses biens aux Templiers11. Pierre de Mauléon est en réalité seigneur de Saint-Lor. La présence de sa pierre tombale à Ermont paraît la conséquence de son mariage avec Aveline qui est une Cernay et dont l’exacte parenté avec Jean, seigneur de Cernay, reste inconnue.

Pierre II et Aveline ont trois enfants, tous trois écuyers, Robin, Robert et Guillaume. Robin hérite de son père la seigneurie de Saint-Lor, vraisemblablement sans enfant, il vend sa seigneurie à l’abbaye de Saint-Denis en 1284. Robert possède une censive à Cernay. L’acte de 1283, auquel est appendu le sceau de sa mère Aveline, porte aussi celui de Robert. Il s’agit d’un sceau rond de 33 mm portant un écu à deux fasces et la légende :


« …OBERT. DE. MAULION. ESC… » (Robert de Maulion [ou Mauléon] écuyer ).


Guillaume, le cadet, est aussi écuyer. Désirant améliorer son état, il entra, en 1281, dans l’ordre des chevaliers du Temple de Paris en leur abandonnant tous ses biens, c’est-à-dire, sa part d’héritage. Son père, Pierre II, est mort depuis dix ans mais la succession n’est toujours pas réglée puisque c’est seulement en février 1283 (n. st.) que sa mère Aveline et son frère Robert font donation aux templiers de quatorze arpents de terre situés à Cernay et dans son voisinage qui représente la part de Guillaume dans la succession de son père.

Avec cette génération se perd le lignage assuré des Mauléon. Les documents consultés signalent la mort, aux environs de 1270 d’un Daniel de Malo Leone, prêtre, inhumé à Notre-Dame de Paris.

En 1347, Jean et Robert de Mauléon tiennent un arrière fief à Sarcelles de Jean Ier de Montmorency. Sont-ce les enfants ou les petits-enfants de Robert ?

Nous ne le savons pas. En tout cas, avec eux disparaît, en l’état actuel des recherches, toute trace de la famille des Mauléon de Saint-Lor.


Quant à l’origine de cette famille, rien ne permet, jusqu’ici, de la rattacher à la célèbre famille gasconne des Mauléon. Peut-on supposer qu’un de ses cadets ait suivi la « reine » Constance lorsqu’elle quitta Raymond V de Saint-Gilles, comte de Toulouse, pour regagner Paris ?12




Gérard Ducoeur,

juin 2009




BIBLIOGRAPHIE


Barbier (E.), Delaplace (J.), Riboulleau (C.), Sacchi (C.), Turgis (G.), Un village nommé Sannois, Valhermeil, 1992, 182 p.


Bedos (B.), La Châtellenie de Montmorency des origines à 1368, Aspects féodaux, sociaux et économiques, SHAPVOV, 1980, 405 p.


Lebeuf (L’abbé J.), Sannoy, in Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, Paris, 1745-1758, rééd. 1883, t. 2, p. 39-45, et t. 3, p. 418.


Lours (M.), Groslay, Saint-Martin, in Églises du Val-d’Oise, Pays de France, Vallée de Montmorency, Dix siècles d’art sacré aux portes de Paris, SHAGPDF, 2008, p. 148-149.


Vaquier (A.), Ermont des origines à la Révolution française, SHAAPV, Pontoise, 1965, 235 p.



Publié sur le site de Valmorency (Association pour la promotion de l’histoire et du patrimoine de la Vallée de Montmorency) : www.valmorency.fr

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1 Cf. « l’Eglise Saint-Martin de Groslay ». Dans cet article, Mathieu Lours identifie, dans la baie 8 de l’église Saint-Martin de Groslay, l’un des donateurs de vitraux du milieu du XVIe siècle, un certain Montléon et il suppose qu’il pourrait s’agir d’une graphie ancienne de Mauléon, un des fiefs de Saint-Brice. En réalité, cette famille est implantée en Vallée de Montmorency dès le XIIIe siècle, même si nous ne savons pas d’où elle est originaire. Serait-il possible que Mathieu Lours ait identifié un descendant de Jean ou de Robert de Mauléon, tenant un arrière fief, à Sarcelles, vers le milieu du XIVe siècle, et qu’un des leurs soit le donateur d’un vitrail à l’église Saint-Martin de Groslay, vers le milieu du XVIe siècle ? Serait-il alors à identifier comme l’un des descendants de la famille des Mauléon, seigneurs du fief de Saint-Lor à Sannois et de la seigneurie de Cernay à Ermont ?

2 Bedos (B.), La Châtellenie de Montmorency des origines à 1368, Aspects féodaux, sociaux et économiques, SHAPVOV, 1980, p. 159-162.

3 Barbier (E.), Delaplace (J.), Riboulleau (C.), Sacchi (C.), Turgis (G.), Un village nommé Sannois, Valhermeil, 1992, p. 65-68.

4 Vaquier (A.), Ermont des origines à la Révolution française, SHAAPV, Pontoise, 1965, p. 105-106.

5 Bedos (B.), op. cit. p.159-162.

6 Autrefois dans l’église Saint-Flaive d’Ermont, puis après avoir été présentée au musée municipal d’Ermont, dès 1986, elle a été transférée, par décision de la Direction des Musées de France, en 2003, au Musée Archéologique Départemental du Val d’Oise à Guiry-en Vexin.

7 Lebeuf (abbé J.), Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, Paris, t. 3, 1758, ré-éd. 1883, p. 418.

8 Vaquier (A.), op. cit. p. 45-47, reproduction.

9 Le jeudi 18 juin 1271.

10 Vaquier (A.), op. cit. p. 105 et Bedos (B.), op. cit. p. 161.

11 Cf. « La présence des templiers en vallée de Montmorency » La maison de Cernay p. 4-5.

12 Barbier (E.), Delaplace (J.), Riboulleau (C.), Sacchi (C.), Turgis (G.), op. cit. p. 65-68.